COMPTE-RENDU DU

« 2ème Rallye Sizaire »

A ENDOUFIELLE (GERS)

LES 24 ET 25 SEPTEMBRE 2003

2ème Rallye Sizaire : Le déluge

La pluie du matin n’arrête pas le pèlerin !

Le succès remporté, en septembre 2003, par la célébration du « Centenaire Sizaire » accueillie par le Musée Henri Malartre à Lyon nous a incité à organiser le « 2ème Rallye Sizaire » qui s’est déroulé les 24 et 25 septembre derniers dans le Gers, entre Toulouse et Auch. L’objectif était de rassembler, et de faire rouler, un maximum de voitures des marques Sizaire & Naudin, Sizaire-Berwick et Sizaire Freres, parmi la cinquantaine recensée dans le monde, et de réunir le plus grand nombre de propriétaires et d’amateurs de ces marques. Il a été atteint, avec 6 voitures roulantes, cinq Sizaire & Naudin de 1906 à 1911 et une Sizaire Frères de 1925, et une quarantaine de participants, parmi lesquels trois propriétaires de Sizaire qui n’avaient pu déplacer leurs autos.

Rendez-vous à Blagnac.

Avant le début du Rallye proprement dit, nous avons profité de la proximité du site aéronautique de Toulouse-Blagnac pour effectuer, le samedi après midi, deux visites exceptionnelles : tout d’abord la collection et les ateliers de l’Association des Ailes Anciennes-Toulouse, sous la conduite d’un pilote passionné et passionnant ; les préoccupations de ces amateurs rappellent, évidemment, celles des collectionneurs de voitures anciennes : de véritables monuments historiques tels que les Noratlas, Caravelle, Super Guppy d’Airbus, etc,… nous sont présentés restaurés ou en cours de l’être. Bravo à ces talentueux passionnés.

Puis, ce fut la visite d’Airbus-Industrie : un peu de nostalgie avec le Concorde « Présidentiel » (n° 01) dans lequel nous avons pénétré et un regard vers l’avenir avec les halls de fabrication des Airbus A330 et A340 : impressionnant ! La nouvelle usine de montage de l’A380 n’était, malheureusement, pas encore ouverte aux visites du public.

Seule la Sizaire Frères 4 RI de Jean Badré, venue par la route depuis… Toulouse, était présente à Blagnac et rejoindra l’Isle-Jourdain par ses propres moyens ; les Sizaire & Naudin se réservent pour le lendemain, le beau temps de cet après midi laissant augurer d’une belle journée…

Les Sizaire et les Naudin dans le Gers.

Le « Centenaire » avait été l’occasion de retrouvailles familiales entre les cousins, descendants de Maurice et de Georges Sizaire. Cette année, nous avions le plaisir de compter parmi nous la plus jeune des filles de Georges Sizaire, Jacqueline, qui a pu nous parler de son père et de son oncle Maurice. La santé de sa sœur aînée ne lui a malheureusement pas permis de se joindre à nous. Mais nous avons également eu le grand plaisir de retrouver pour le Rallye les petits-neveux de Louis Naudin (voir encadré 1). Les conversations allèrent bon train au cours du dîner où chacun pu apprécier, outre la cuisine gasconne, les documents originaux amenés par les uns et les autres.

Cette rencontre permit également aux amateurs de Sizaire, de faire le point sur le « parc » connu et de déplorer la disparition, depuis le Centenaire, de deux enthousiastes de ces marques : Celle du docteur Lafage, au début de 2004, qui aurait eu tellement de plaisir à venir en voisin nous présenter sa Sizaire-Six de 1928 (Sizaire Frères équipée du moteur sans soupape Willys-Knight), après une minutieuse et magnifique restauration (voir LVA n°1109, du 8 janvier 2004). Enfin le décès, plus récent, de Guy Mélano. Il était venu à Lyon pour le Centenaire avec sa voiturette Sizaire & Naudin, alors en cours de restauration et qu’il ne parvenait plus à mettre en route (voir LVA n° 1106, du 18 décembre 2003) ; les participants présents se souviennent de sa joie quand le moteur a enfin tourné…Il nous avait annoncé sa participation au 2ème Rallye avec enthousiasme ; hélas…

Déluge pour le Rallye.

Le temps était un peu bouché le lendemain matin et l’humidité du lac de L’Isle Jourdain recouvrait la Sizaire Frères 4 RI qui avait dormi dehors, devant l’hôtel, protégée par son « couvre-tonneau » tout neuf. Les premières gouttes tombèrent, doucement , à notre arrivée à Endoufielle pour le départ du Rallye. Les cinq Sizaire & Naudin et la Sizaire Frères sont prêtes : dernières vérifications et contrôle des niveaux, mise en place des plaques de rallye. Le déluge a commencé au moment précis du départ, trempant les pilotes jusqu’aux os en quelques minutes et stoppant impérativement les voitures : en toute hâte, on monte les capotes de celles qui en sont équipées : la monocylindre de Roger Bat (avec sa fidèle co-pilote Denise), munie de son pare-brise et de sa capote est « prepared for bad weather », comme sur la publicité d’époque de Charles Jarrotts, l’importateur Sizaire & Naudin à Londres. Roger est le doyen de notre rassemblement et vient de fêter allègrement ses 83 ans. Alain et Juliette Cattelan installent également la capote sur leur runabout de 1906, la doyenne des voiturettes présentes ; on remplace rapidement le couvre tonneau par la grande capote du torpédo Sizaire Frères. Mais les trois autres voiturettes laissent leurs pilotes sous la douche ! D’ailleurs Jean-Marie Hannebert, petit-fils de Maurice Sizaire, devra déclarer forfait pour sa voiturette type 4G à moteur 4 cylindres (voir encadré 2: « C’est sa première sortie après une longue restauration mécanique : mais je crains que les roues à rayons bois, non peintes, qui sortent à peine de chez le charron, ne supportent pas un régime aussi arrosé ». Dossier de restauration à venir pour « Restaurée en… ».

Du château de Rochetaillée au château de Caumont.

Une accalmie permet enfin de prendre le départ ; la voiturette « rouge », que son ancien propriétaire, Yvon Lannes, était ravi de reconduire, prend la tête, en régionale de l’étape. Elle est suivie par la «blanche » dépêchée par le Musée Henri Malartre, également en grande forme, ainsi que son pilote, Alain et son copilote, sans doute rompus à ces déplorables conditions météorologiques ! Rien ne les arrête et ils ne regrettent pas le déplacement Lors du Rallye du centenaire, un petit problème d’embrayage avait contraint la voiture à l’abandon après quelques kilomètres, mais elle a été bien réparée ! Nous arrivons au château de Caumont, superbe monument historique du XVIème siècle que les propriétaires nous font visiter. C’est la maison natale du célèbre duc d’Epernon et on y voit entre autres, un portrait du duc de La Rochefoucauld-Liancourt (un parent de la famille !), fondateur en 1780 de l’école des Arts & Métiers dont nombre d’ingénieurs de l’automobile est issu.

A Gimont : Tout savoir sur Sizaire, Naudin, Berwick, etc…

Le Rallye se poursuit sur les charmantes routes de la campagne gersoise, mais la vue est bouchée et le plafond bas ! On arrive à Gimont, où un arrêt est prévu sous la magnifique halle ; redoutant une « rechute », les pilotes se sont empressés de rejoindre le château de Larroque où les attendait le déjeuner. D’ailleurs, ils ont vu juste car, pendant le café, la pluie reprend du service, obligeant de nouveau à retarder le départ.

On profite de ce délai forcé pour dépouiller le petit « Quiz » de 12 questions remis aux participants avec le road-book. Le questionnaire porte sur les voitures Sizaire et la vie des différentes sociétés qui les ont construites. Il permettra de faire le point et, peut-être de rectifier quelques erreurs. On y apprend, par exemple, que la dernière Sizaire présentée au Service des Mines en France fut une Sizaire-Berwick, en février 1931 (construite à Courbevoie par la Compagnie Internationale Aéronautique !). La 4ème question reste toutefois sans réponse : « Lors du Rallye de l’inauguration officielle d’Eurotunnel, organisé par la FFVE le 6 mai 1994, l’année 1907 était représentée par une voiturette Sizaire & Naudin (Voir LVA n° 653, du 5 mai 1994). Qui en était le propriétaire ? Aucun des participants présents, en tous cas ! Un lecteur avisé de LVA pourra-t-il répondre ?

Retour au Vide Grenier d’Endoufielle.

La pluie n’ayant pratiquement pas cessé, le trajet de retour sur Endoufielle se fera par la RN 124, empruntée pour le transport des « gros colis » hors gabarit des tronçons de l’Airbus A380. Les voiturettes Sizaire & Naudin ont la place…

Le programme prévoyait, à l’arrivée à Endoufielle, une exposition des voitures dans le cadre du Vide Grenier du village. Hélas, à notre arrivée, la pluie avait chassé depuis longtemps visiteurs et exposants ! C’est donc chez Madame le Maire que la médaille d’honneur de la commune fut remise aux organisateurs et que le pot de l’amitié fut servi. Merci du bon accueil dont Endoufielle nous a gratifié. Ce « 2ème Rallye Sizaire » fut, somme toute, bien arrosé et, malgré cela, les participants en garderont un bon souvenir, car les voitures, plus belles les unes que les autres, et leurs supporters, étaient là et aucun incident, mécanique ou autre, n’a été à déplorer ! Rendez vous est dores et déjà pris pour le « 3ème Rallye Sizaire » qui devrait avoir lieu le dernier week-end de septembre 2007 : les plus anciennes Sizaire & Naudin subsistantes seront alors centenaires…Ça se fête ! Sans doute la région parisienne accueillera-t-elle ses filles ?

Les partenaires du Rallye : Mairie d’Endoufielle (Gers) - Musée Henri Malartre-Ville de Lyon - Syndicat des Coteaux d’Aix-en-Provence - La Vie de l’Auto –

Encadré 1

Sizaire Freres & Naudin : Les Retrouvailles.

Les lecteurs en seront-ils étonnés, c’est grâce à La Vie de l’Auto que les descendants des Sizaire ont retrouvé la famille Naudin. La lecture du passionnant livre de Jean-Luc Ribémont, : « La Mémoire de l’Automobile, 1895-1995, Bérry/Poitou/Val de Loire » (éditions de la Nouvelle République, Tours), dans lequel un article consacré à « La Légende des Naudin » nous apprenait l’existence à Issoudun (patrie de Louis Naudin) d’une certaine Nathalie Naudin. Nous avions tenté, en 2003, de la retrouver en lançant un appel dans LVA lors de la préparation du Centenaire : sans succès. En juillet 2004, un article sur un coupé à identifier devant la gare de Vierzon (LVA n° 1128 du 1er juillet 2004) nous permettait de réitérer notre appel qui, cette fois fut entendu par…un cousin par alliance des Naudin, établi à La Châtre, non loin d’Issoudun. Cette fois, contact fut pris et nos retrouvailles avec Philippe Naudin, petit neveu de Louis Naudin, son épouse Michèle et leur fille Nathalie, eurent lieu à l’occasion de Rétromobile 2005, au moment où le 2ème Rallye Sizaire se précisait. Les Naudin se sont tout naturellement joints aux descendants de Maurice et de George Sizaire pour cette dernière manifestation. Merci LVA !

Il faut préciser que Louis Naudin, ami des frères Sizaire, puis associé, depuis 1903 était né à Issoudun (Indre) en 1880 dans une famille de mécaniciens-fondeurs et qu’il a ensuite travaillé chez De Dion-Bouton à Puteaux ; il est décédé prématurément de maladie, sans postérité, en 1915, à l’âge de 35 ans.

Encadré 2

Technique : Voiturette Sizaire & Naudin, type 4G, 1911.

Les succès remportés dans les années 1906-1908 par les voiturettes Sizaire & Naudin, en courses, comme auprès de la clientèle, l’ont été avec des monocylindres, directement issus du premier moteur (avant 1903), qui avait les modestes cotes de 100 x 110 (soit 864 cm3). Même si les mensurations, et les performances, ont ensuite augmentées (pour atteindre en 1908 la course extravagante de 250 mm, soit une cylindrée de 1 963 cm3), le moteur monocylindrique atteignait ses limites. A partir de 1909, Sizaire & Naudin laissa la compétition de côté pour se consacrer à l’étude d’un moteur à 4 cylindres. Cela donna naissance, au début de 1910, au moteur 4G équipant les voiturettes dont le châssis et la transmission restaient fidèles aux précédentes réalisations. La voiturette de Jean-Marie Hannebert est une des premières 4 cylindres construites par Sizaire & Naudin. Seules 4 ou 5 sont connues de part le monde.

Le moteur 4G était très inspiré du moteur monocylindrique et, par là, assez original : carter inférieur en deux parties avec plan de joint vertical, perpendiculaire à l’axe du vilebrequin ; distribution semi-culbutée avec soupapes d’admission et d’échappement opposées, latéralement aux cylindres, admission commandée par tiges et culbuteurs extérieurs, échappement par l’intermédiaire d’un renvoi à sonnette. Les deux mouvements sont donc à angle droit ce qui permet d’utiliser la même came pour les deux (90 ° d’arbre à cames correspondent effectivement à 180 ° ou ½ tour de vilebrequin entre le temps d’échappement et celui d’admission du cycle suivant). Le jeu des soupapes d’échappement et, naturellement, le calage de la distribution, ne sont pas réglables (!). L’arbre à cames (qui ne comporte donc que quatre cames) et le vilebrequin sont montés chacun sur deux solides roulements à billes.

Avec un alésage de 70 mm et une course de 120 mm, la cylindrée est de 1847 cm3, pour une puissance catalogue (ou administrative) de 12 ou 10 HP, suivant les années (!), à la vitesse de 2 200 tr/min. Les cylindres sont borgnes et le « bloc-cylindres » se monte sur les pistons préalablement installés sur les bielles, elles mêmes montées sur le vilebrequin, lui-même installé sur le carter inférieur (ouf !).

L’alimentation par carburateur ne fait plus appel au clapet d’entrée d’air des carburateurs Sizaire & Naudin et le réglage de la vitesse ne fait plus appel à la variation de course de la soupape d’admission, mais par un classique papillon. L’allumage se fait par une magnéto montée à l’avant du moteur, entraînée par un renvoi d’ange à engrenages coniques, rapport 1/1, la magnéto comportant son propre réducteur. Le refroidissement se fait par l’eau circulant en thermosiphon dans des chambres entourant les côtés et le haut des cylindres. Il n’y a donc pas  de pompe à eau, mais un ventilateur bipales monté à l’avant du bloc-cylindres est commandé par une courroie torique entraînée par une poulie en bout de vilebrequin. Le graissage des bielles (et des pistons) se fait par barbotage à l’aide de cuillers disposées de fonderie (ou de forge) sur les chapeaux. Celui des paliers par un goutte à goutte, réglable par le conducteur (ou son co-pilote) depuis le poste de conduite.

A l’autre extrémité, le volant moteur en fonte, formant plateau d’embrayage est, évidemment plus lourd (env. 45 kg) que sur le moteur monocylindre car il n’y a plus la masse des deux grosses joues du vilebrequin formant la manivelle du mono. Une gorge interne, venue de fonderie, forme réserve d’huile pour graisser l’embrayage plan ; la friction ne se fait plus métal contre métal mais par l’intermédiaire d’un plateau en cuir.

Pour le reste, le châssis 4G reste conforme à ses prédécesseurs : suspension avant à roues indépendantes par coulisseaux verticaux, la suspension arrière se faisant maintenant par des ressorts ¾, puis 4/4 elliptiques, transmission avec la boîte-pont à trois vitesses plus marche arrière, direction et freins sont très semblables à ceux des voiturettes à moteur monocylindre .

Une éphémère évolution avec le même alésage de 70 mm mais une course portée à 140 mm, donnant une cylindrée de 2 155 cm3, est réceptionnée au Service des Mines en septembre 1910 (type 4GH), mais sera rapidement remplacée, en mai 1911, par un tout nouveau moteur (type 4H) de 70x170, soit 2 617 cm3, avec 2 arbres à cames latéraux ! Mais ceci est une autre histoire…

Légende des photos :

-         0511-6A : Runabout Sizaire & Naudin 4G – 1911 de Jean-Marie Hannebert au départ ; c’était sa première sortie… ; les jeunes passagers sont les arrière-arrière-petits-enfants de Maurice Sizaire.

-         0511-7A : Encadrant la voiturette Sizaire & Naudin du Musée Henri Malartre, les voiturettes de Roger et Denise Bat, et de Alain et Juliette Cattelan, « prepared for bad weather » : remarquer l’évolution des radiateurs et des capots-moteurs de la marque.

-         0511-12A : Le superbe torpédo Sizaire Frères 4RI-1925 de Jean Badré avec une authentique Sizaire & Naudin-1908 pilotée par Yvon Lannes.

-         0511-18A : Au château de Caumont, Philippe Naudin, petit-neveu de Louis Naudin, prend le volant de la Sizaire & Naudin 1908 ; à bord du runabout du Musée Henri Malartre, Jacques Burel-Audibert, petit-fils de Maurice  Audibert  et Jean-Claude Hannebert-Sizaire, petit-fils de Maurice Sizaire.

-         0512-7A : Au château de Larroque, La Sizaire Frères 4RI-1925 entourée de ses ancêtres Sizaire & Naudin de 1906 à 1909.

-         0512-15A : Max Médard-Sizaire remet à son cousin une assiette en faïence de Montereau à l’effigie de la Sizaire & Naudin-1906.

-         0512-16A : Madame le Maire d’Endoufielle remet la Médaille d’Honneur de la Commune au petit-fils de Maurice Sizaire.